Lorsque l’enfant paraît… quand l’enfant vient, la joie arrive et nous éclaire »… Ces quelques vers de Victor Hugo pointent le bonheur qui accompagne une naissance. Pourtant, entre la naissance d’un enfant et l’émergence du sujet, il y a un hiatus qui implique une rencontre fondamentalement « traumatique » avec le langage, même si elle n’est pas toujours cliniquement manifeste. La naissance prématurée, la maladie et les maux du tout-petit accentuent cette première béance et en démontrent les enjeux. Avant même qu’il balbutie ses premiers phonèmes et énonce ses premiers mots, le tout-petit est parlé, on parle de lui, on lui parle, inscrivant une histoire qui anticipe et prépare sa venue au monde, son advenue comme sujet. Néanmoins, l’enfant vient au monde avec un certain impossible à s’inscrire dans ce qui le précède, d’où le malentendu qui tourne autour de lui, mais d’où aussi pour lui l’espace pour poser l’acte de son assomption subjective. L’enfant, dans sa présence, dépasse le désir de grossesse comme le désir d’enfant. Le babil, les premiers rires de l’enfant, ses premiers jeux avec les mots, ses premières demandes mobilisent tout l’effort du petit sujet. Comment accueillir et soutenir l’émergence subjective de la parole ? Comment entendre les symptômes, les manifestations dans le corps du tout-petit, comme autant de vouloir-dire du petit sujet ? L’enfant porte la marque de la façon dont il a été désiré par ses parents. S’y manifeste dès lors « l’irréductible d’une transmission », qui est d’un autre ordre que celle de la vie selon la satisfaction des besoins, mais qui est d’une constitution subjective, impliquant « la relation à un désir qui ne soit pas anonyme ». Voilà ce à partir de quoi le tout-petit, comme sujet, aura à se déterminer. Comment le tout-petit va-t-il dès lors s’engager sur le chemin de la vie, sur la voie de son désir ? Quelle pratique clinique possible pour les professionnels accueillant les tout-petits en institution et dans des lieux d’accueil ? Les contributions du présent ouvrage donnent la parole aux tout-petits, à celles et ceux qui s’orientent des petits pas du sujet. Cet accueil singulier nécessite d’en passer par une clinique du détail, non pas tant pour s’occuper du sens, que de repérer l’impact qu’a le réel sur le sujet en ce temps de la petite enfance.